Institut recherche jacquaire (IRJ)

La fête du 25 mars et les trois célébrations


Rédigé par le 22 Juillet 2016 modifié le 24 Juillet 2016
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Chacune de ces quatre fêtes aurait alors pour vocation particulière de commémorer un fait historique à la date où il aurait effectivement eu lieu : la translation de sa dépouille d'Iria à Compostelle un 25 juillet, la déposition de celle-ci dans le tombeau construit à cet effet un 30 décembre, enfin un miracle accompli un 3 octobre. Ces quatre fêtes auraient donc pour caractéristique commune d'être les anniversaires d'événements anciens, mais une difficulté n'en subsiste pas moins, car la principale, celle de la décollation qui fonde la qualité de Jacques comme martyr, est la seule à ne pas avoir de célébration liturgique correspondante.



Le martyre du 25 mars.

Bien qu'il fasse la référence incontournable à l'évangéliste Luc, auteur des Actes des apôtres, seul texte qui mentionne la décollation, le rédacteur du Codex calixtinus reconnaît d'emblée que l'on ne possède aucun témoignage exprès de la date exacte. Mais ce n'est que pour mieux déclarer ensuite avec une assurance confondante qu'elle a eu lieu lors de la date anniversaire de l'Annonciation à la Vierge Marie, le même jour et à la même heure que la Passion du Christ. Extraordinaire coïncidence, à laquelle nul ne songerait tant elle est invraisemblable, si par l'effet d'une révélation miraculeuse elle n'avait été communiquée, quelque douze siècles plus tard, à un fidèle connu du signataire.

25 mars, fête de l'Annonciation

La détermination du 25 mars comme date de l'Annonciation est, de toute évidence, une conséquence de la fixation de Noël à la date du 25 décembre, puisque on se trouve là exactement neuf mois auparavant. C'est une conséquence à la fois gynécologique et liturgique de la date retenue pour Noël, ce n'est pas la commémoration d'un événement qui se serait produit le 25 mars de l'année -1. Tandis que la décollation de saint Jacques appartient à l'histoire du 1er siècle de notre ère, la fête de l'Annonciation du 25 mars est une célébration liturgique qui ne peut avoir été attribuée au 25 mars qu'après fixation de la date de Noël au 25 décembre, par le pape Jules Ier au IVe siècle. La fête liturgique de l'Annonciation et le martyre effectif de saint Jacques ne figurent donc pas dans le même registre chronologique et leur coïncidence prétendue est tout à fait factice.
 

Comment la décapitation a eu lieu un 25 mars

La correspondance entre le martyre de saint Jacques et la Passion du Christ est évoquée d'une façon inconnue des autres récits du martyre, même du plus riche en allégations gratuites. Aussitôt après la décapitation, un excellent homme qui était une sorte de prélat,  parla ainsi de Dieu à la foule réunie dans la cour royale, disant : " Il a été jugé vers la troisième heure et vers la neuvième heure, comme le Christ, il a trépassé. Le maître et le disciple ont subi la passion le même jour et à la même heure."
Ce prélat soulignant la concordance temporelle entre les deux événements est manifestement inventé pour justifier, au moyen d'une fausse citation, la conclusion que veut tirer l'auteur.
Martyrisé un jour anniversaire non seulement de l'Annonciation mais de la Crucifixion, Jacques l'emporte donc sur tous les saints car nul ne saurait sans doute se montrer plus proche du Christ qu'il ne le fait par là. Cette prodigieuse coïncidence, qui ne peut émaner que d'un insondable décret de la Providence si on l'estime authentique, n'en présente pas moins des caractères qui invitent à douter en bloc de l'historicité à laquelle elle prétend. En effet, l'auteur déclare qu'elle n'a été que récemment révélée à un fidèle de sa connaissance. C'est une manière de reconnaître que la fixation de la Passion de saint Jacques à la date du 25 mars n'existe pas avant la rédaction de ce texte. Jusqu'alors, le martyre de saint Jacques tombe seulement en plein temps pascal, comme il arrive aussi parfois à la fête de l'Annonciation.
Le problème central auquel cette manipulation tente de donner une solution est l'impossibilité de célébrer dignement le martyre de saint Jacques au jour qui conviendrait, parce que la liturgie qui évite de célébrer plusieurs grandes fêtes un même jour, ne peut qu'instituer un ordre de préséance entre celles qu'elle conserve. La fête de saint Jacques serait donc quelque peu écrasée par la fête de l'Annonciation, qui elle-même parfois, comme dit le texte un peu plus bas, "tombe entre les Rameaux et Pâques ou pendant la semaine de la Résurrection et ne peut être célébrée pleinement."

A plus forte raison, la fête de saint Jacques risquerait donc de passer au troisième rang, et de se trouver ainsi déclassée aux yeux des adeptes de l'Apôtre.  L'auteur, fixe donc une correspondance chronologique exacte entre le martyre de saint Jacques, l'Annonciation à la Vierge Marie et la Crucifixion du Christ. Il exalte évidemment par là saint Jacques au-delà de tout ce qui a pu être rapporté jusqu'alors à son sujet et tente de donner un fondement en apparence objectif à cette exaltation du culte jacquaire.
La date du 25 mars est toutefois, destinée à demeurer à l'arrière-plan du discours puisque, à la différence des autres, elle ne donne pas lieu à une célébration liturgique. Elle n'en constitue pas moins, semble-t-il, la justification profonde des trois fêtes retenues. Ne pouvant être célébrée dignement au moment où elle tombe, elle devient le refoulé qui se trouve surcompensé sous la forme exceptionnelle d'une triple célébration.

Voir l'article d'où est tiré cet extrait simplifié