Institut recherche jacquaire (IRJ)

« LE » saint Jacques des pèlerins du Moyen Age, étape n° 23


Rédigé par Denise Péricard-Méa le 9 Avril 2020 modifié le 10 Avril 2020
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saint Jacques auteur
saint Jacques auteur

Saint Jacques vénéré à Compostelle est  l’un des deux apôtres de ce nom, le Majeur, fils de Zébédée. Le second est le Mineur fils d’Alphée, frère ou cousin du Seigneur, évêque de Jérusalem. Mais il est désigné de tant d’autres qualificatifs (le Juste, le fils du charpentier, le Petit …) que même les théologiens se sont perdus dans son identité.

Le Majeur est considéré, au Moyen Age, comme auteur de l’Epître, des Actes et même d’un Evangile.
Très souvent lue, même à Compostelle, l'Epître a donné naissance à l’Extrême-Onction, liée à la figure du " passeur des âmes ", popularisée par la légende de Charlemagne au XIIe siècle.


Epître Jacques, V, 14 (Rogier van der Weyden. XVe siècle)
Epître Jacques, V, 14 (Rogier van der Weyden. XVe siècle)
« Quelqu’un parmi vous est-il malade ? Qu’il appelle les prêtres de l’Eglise, et qu’ils prient sur lui, l’oignant d’huile au nom du Seigneur. Et la prière de la foi sauvera le malade ; le Seigneur le soulagera, et s’il a commis des péchés, ils lui seront remis ».
 
De l’Evangile de Jacques sont retenus tous les épisodes de la vie de la Vierge. Des Actes provient l’idée que, pendant dix ans, saint Jacques a guéri au nom de Jésus, d’où l’image de la transmission de ce pouvoir par le don d’une verge (étape 15).

Dans la pratique, on trouve le plus souvent l’unique appellation « saint Jacques apôtre ». Par exemple, en 1150, l’église de Saint-Jacques-des-Guérets (Loir-et-Cher) n’a que « saint Jacques » pour vocable. Au début du XIVe siècle, pour Dante, le poète, l’auteur de l’Epître est saint Jacques apôtre :
« Ce pourquoi saint Jacques apôtre dit en son épître Voici que l’homme des champs attend le précieux fruit de la terre…” ».
Tout se fait selon une logique qui nous échappe. Exemple, entre 1175 et 1195 l’historien de l’abbaye Saint-Jacques de Liège passe de « saint Jacques frère du Seigneur » à « saint Jacques, frère de saint Jean l'Evangéliste » sans commentaire permettant de supposer un changement de vocable.

Deux représentations de saint Jacques : Saint-Gilles du Gard et Moissac
Deux représentations de saint Jacques : Saint-Gilles du Gard et Moissac

Le langage simplifié des images pousse à représenter le Majeur en pèlerin et le Mineur en évêque. Mais une observation plus fine montre très souvent qu'il n'en est rien. Ainsi, le saint Jacques de Moissac (à droite), dit le Majeur tient de Jacques évêque de Jérusalem avec son costume ou de Jacques le Juste avec ses cheveux et sa barbe hirsutes. Certains lui trouvent une ressemblance avec saint Jacques « frère du Seigneur, évêque de Jérusalem » dans le collège apostolique, au portail de Saint-Gilles. Le Majeur  est, lui, l’auteur de l’Epître dont une phrase est gravée sur le Livre qu’il porte. Trop longue pour tenir sur le Livre, elle est terminée autour de l’auréole.


saint Jacques à Saint-Gilles
saint Jacques à Saint-Gilles
Ces textes et images, montrent saint Jacques compagnon du pèlerinage qu’est la vie et accompagnateur lors du passage dans le monde des Morts. Une ballade de la fin du XVe siècle, « Prière de saint Jacques apôtre », répète ce qu’on attend de lui dans chaque dernier vers des strophes,
« bonnement pouvoir vivre et mourir ».
Dès lors, il est évident que le seul sanctuaire de Compostelle ne peut répondre à tant de demandes et que se mettent en place une multitude de sanctuaires à reliques, en vertu du fait que chacune est un support à la prière, un élément concret faisant mémoire du saint, une « parcelle dure d’éternité », chaque morceau valant le tout.
Les pèlerins médiévaux ne s’y sont pas trompés, y compris ceux qui, arrivant à Compostelle, se souviennent des reliques qu’ils ont rencontrées en chemin. Le pèlerin de Valenciennes Jean de Tournai, en 1490, conclut :
« Pour conclusion, je n’en veux point faire débat. Saint Jacques est en Paradis ».
Dix ans plus tard, un chevalier allemand, Arnold von Harff aboutit aux mêmes déductions dès Venise et « laisse ces confusions des prêtres au jugement de Dieu ». Arrivé à Toulouse où il voit encore saint Jacques, il ne mentionne même plus son étonnement. A Compostelle il se fait vertement réprimander en posant des questions.
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Un miracle a fait découvrir à Compostelle un tombeau attribué à Jacques le Majeur. Respectueuse de ceux qui donnent foi à ce miracle, une association dit de Compostelle qu'elle est la " résidence " de Jacques le Majeur, devenu Jacques-de-Compostelle. Des pèlerins montreront demain qu'il a de nombreuses " résidences secondaires ".