Institut recherche jacquaire (IRJ)

Déambuler dans Compostelle, étape n° 52


Rédigé par Denise Péricard-Méa le 8 Mai 2020 modifié le 8 Mai 2020
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Ceux qui, comme moi, ont marché avec le Guide Bernès, cent fois maudit mais tellement précieux parce, sans lui, on se serait perdus cent fois plus, ont rêvé sur la dernière page de sa partie « historique ». Nous entrerions dans la ville par la rue Bonaval et nous y verrions le calvaire de l’Homo Santo ! C’était encore si loin ! De fait, en arrivant, je ne suis pas sûre que nous l’ayons vu, mais ce calvaire fait partie des visites que j’aime faire quand je reviens à Compostelle.
Après l'avoir vu, je vous propose de déambuler avec moi dans Compostelle.



Le calvaire de l’Homo Sancto

La croix de l'Homo sancto
La croix de l'Homo sancto
Voici l’histoire telle que la raconte l’abbé Bernès
« En 1319, Jean Touron, un pauvre homme de Compostelle, fut condamné injustement à mort pour un crime qu’il n’avait pas commis. Comme on le menait au supplice, en passant devant une statue de la Vierge, il l’invoqua en lui disant Ven e valme, viens et sers-moi de témoin. Au même instant, il s’écroula, mort, au pied de l’image sainte […] Sur les lieux du miracle on édifia un calvaire. Le Christ crucifié repose sous un dais. Sur deux consoles, la Vierge et saint Jean. En dessous, saint Jacques en pèlerin entouré de ses deux disciples. Au revers, la Vierge à l’enfant entourée par saint Pierre et saint Paul. Au-dessous, la Vierge des Douleurs vénérée par deux anges ».

Une fois terminés les rituels d’arrivée, des visites  laissent encore dans l’ambiance du pèlerinage.  Voici mes préférées, découvertes au fil de mes retours à Compostelle. Il y en a beaucoup d’autres.

La porte sainte

La porte sainte, place de la Quintana
La porte sainte, place de la Quintana
Elle n’est ouverte que pendant chaque année sainte. Ces années saintes ont été instaurées sur le modèle de celles de Rome, qui datent de 1300. Le rituel du franchissement de cette porte est beaucoup plus récent car la porte elle-même a été construite en 1612. Elle est décorée de 24 statues romanes qui font croire que l’on se trouve devant une porte romane. Mais ces statues ornaient le chœur du XIIe siècle, détruit. Certaines ont été restaurées au XIXe siècle. Les statues couronnant la porte, saint Jacques encadré de ses deux disciples, datent de 1694. La grille date de la même époque.

Le chœur de la cathédrale du XIIe siècle

Reconstitution du choeur du XIIe siècle
Reconstitution du choeur du XIIe siècle
Au XVIIe siècle, le chœur fut démantelé et remplacé par un chœur en bois. Des morceaux ont été réutilisés, d’autres gisaient épars dans les sous-sols.
En 1999 certains ont été utilisés dans une reconstitution de ce chœur, commencée de nombreuses années auparavant. Elle a été installée dans une salle du musée de la cathédrale. La présentation en est remarquable.

Le bourdon de saint Jacques

Le bourdon de saint Jacques dans la cathédrale
Le bourdon de saint Jacques dans la cathédrale
Selon la légende, ce bourdon aurait été trouvé aux côtés de saint Jacques quand l’évêque Théodomir a ouvert sa tombe nouvellement découverte, au IXe siècle.

Pieusement conservé dans la cathédrale, il a été longtemps suspendu sur le pilier situé en face de l’Epître, côté droit quand on regarde l’autel (photo ci-dessus). Décroché à l’occasion des travaux préparant l’année sainte 2020, il n'a pas retrouvé sa place.

Le bourdon dans la salle du trésor
Le bourdon dans la salle du trésor



Une place lui a été trouvée dans la salle des reliques du Trésor de la cathédrale. 


Au XIe ou XIIe siècle, le bourdon lui-même a été enfermé dans un magnifique étui de cuivre torsadé pour le protéger des pèlerins qui en grattaient des morceaux. Ensuite, ils n’ont pu que toucher le bout ferré qui dépasse de l’étui. La statue de saint Jacques qui le surmonte date du XVIe siècle.

La fontaine des bœufs

Lorsque la barque de saint Jacques eut accosté à Padron, les disciples, grâce à plusieurs miracles, réussirent à mettre saint Jacques sur un chariot tiré par des bœufs. Dans cet équipage, ils reviennent vers la reine Louve qui se convertit et leur permet de partir. Dernier miracle, les bœufs prirent le chemin sans qu’on leur indique une direction et marchèrent en remontent la vallée du Sar. Ilamzda,s s’arrêtent, grattent la terre, il surgit une fontaine. Les disciples comprennent qu’ils sont arrivés sur le lieu de la sépulture.
Aujourd’hui, cette fontaine est toujours là, au n°5 rua de Franco. L’inscription qui la surmonte porte la date de sa réédification. A côté, sur la droite, une porte surmontée d’une coquille, fermée par une grille abrite une discrète chapelle Saint-Jacques visible à condition de savoir qu’elle est derrière, ouverte sur l’extérieur.
La coquille qui la surmonte est la preuve d’appartenance au chapitre de la cathédrale.

Le parc de la Alameda

Parc Alameda, Sainte-Suzanne
Parc Alameda, Sainte-Suzanne
J’ai connu ce parc par les descriptions enthousiastes de l’abbé bordelais Laurent d’Arce qui séjourna deux mois à Compostelle en 1919, sans doute une convalescence après la guerre, dans Sur les routes de Compostelle après la Grande Guerre. Il y passait de longues heures et évoquait souvent l’église Sainte-Suzanne.

Je l’ai visité seulement cet automne, avec un très grand plaisir. On y trouve non seulement Sainte-Suzanne mais le Paseo da Ferradura, immense, la statuaire, l’escalier monumental et l’air du XIXe siècle qui a vu naître ce parc, en 1835.

C’est un parc mais aussi une somme de jardins conçus pour le dépaysement.

Vista Alegre

Vista Alegre vue côté chapelle
Vista Alegre vue côté chapelle
Ne cherchez pas Vista Alegre dans les guides, vous n’y trouverez que « Maison de l’Europe ». Un Catalan, Jaime Figueras nous a fait connaître cette belle propriété qui surplombe la ville. Il y fut reçu, en 1948, avec son groupe scout pendant le pèlerinage de l’Action catholique.
La propriété a été construite en 1903 par une famille de Compostelle. L’épouse du fondateur, Dna Isabel, a passé sa vie à pratiquer une charité constructive, fondation d’école, bibliothèque, sanatorium ; elle a participé à la conception et au financement de l’aéroport, etc.
 
En 1924, la ville de Santiago la déclara sa « Fille Favorite », en 1954 elle lui décerna la Croix d’Argent. Après sa mort, la propriété est restée dans la famille, mais elle en fut expropriée en 1997 pour y créer un campus universitaire. Les jardins sont ouverts au public et connaître l’histoire de ce lieu ajoute au plaisir de le visiter.

Pour une visite plus complète et lire le " testament " de Vista Alegre, voir cet article.

Saint Martin de Tours à Compostelle

Saint Martin fait abattre un pin représentant le démon
Saint Martin fait abattre un pin représentant le démon
Sur la place de la Immaculada, face à la cathédrale, l’imposant monument qui fut l’abbaye San Martin Pinario, la plus importantes de Galice et la seconde d’Espagne. (évoquée dans l'étape n°2).
Combien de pèlerins fréquentent et apprécient son hospederia ! Tous savent que le saint patron est Martin de Tours puisque l’église est surmontée d’une statue représentant le partage de son manteau avec le pauvre.

Moins nombreux sont ceux qui poussent la porte de l’église. C’est là que l’on découvre que le qualificatif Pinario n’évoque pas l’abbaye implantée dans une pinède, mais le « miracle du pin » réalisé par saint Martin quelque part en Touraine ou en Berry. Un immense panneau de bois sculpté et peint, dans la nef à droite (après la chaire) , présente ce miracle d’une manière à la fois naïve et réaliste.
 
Sulpice Sévère, le contemporain et biographe de saint Martin, y a assisté :
« Dans un bourg, après avoir détruit un temple, Martin se disposait à faire abattre aussi un pin qui était tout proche du sanctuaire. Alors, le prêtre du lieu et la foule des païens s'y opposèrent. Ces mêmes hommes qui, par la volonté du Seigneur, s'étaient tenus tranquilles pendant la démolition, ne voulaient pas permettre que l'on coupât un arbre […]
L’un des païens : ‘nous couperons nous-mêmes cet arbre, à la condition que tu sois dessous pour le recevoir dans sa chute. Si ton Seigneur est avec toi, comme tu le prétends, tu échapperas’. Martin promit.
[…] Ce pin penchait d'un côté, et l'on ne pouvait douter qu'une fois coupé, il s'abattrait de ce côté-là. Martin fut placé et attaché à cet endroit, choisi par les paysans, où personne ne doutait que dût tomber l'arbre […]
Peu à peu, l'on vit le pin vaciller, menacer ruine par sa chute. On voyait pâlir les moines […] Quand le pin s'écroulant eut fait entendre son grand fracas, à cet arbre qui tombe, Martin oppose sa main tendue pour le signe du salut. Alors le pin, comme ramené en arrière à la façon d'un tourbillon, s'abat du côté opposé, si bien que les paysans sont sur le point d'être écrasés ».

Dans le repaire des géants

Les géants dans les greniers de la cathédrale
Les géants dans les greniers de la cathédrale

Plus difficile à visiter, le repaire des géants qui participent (participaient ?) aux grandes processions hors de la cathédrale. Tout une symbolique…


Ils ne sortent pas souvent....
   ... ils attendent l'année sainte
Vous les verrez en 2021.



Demain nous irons vers l'Océan,