Institut recherche jacquaire (IRJ)
PATRIMOINE CONTEMPORAIN
La création artistique au long des chemins de Compostelle a été encouragée par le Conseil de l'Europe lorsqu'il a défini ces chemins comme premier Itinéraire Culturel Européen. L'exploitation commerciale de l'engouement pour Compostelle par des promoteurs peu scrupuleux auprès d'organismes politiques ou administratifs incompétents a conduit à l'éclosion d'un grand nombre d'oeuvres dans une importante surenchère de ronds-points, statues ou compositions diverses.

En 1950, Paul Guinard (directeur de l'Institut français en Espagne pendant 30 ans), concluait ainsi un propos sur saint Jacques et le pèlerin dans l’art chrétien :
« ... les rénovateurs de l’art religieux, depuis un demi-sièçle, semblent avoir ignoré saint Jacques. Seul le poète du Soulier de Satin et du Livre de Christophe Colomb a fait surgir sur la scène une ombre gigantesque : le "pèlerin de l’Occident ... phare entre les deux mondes ... ".
Quel maître fixera sur la toile ou sur la pierre, le saint Jacques "cosmique" rêvé par Claudel ?
Verrons-nous refleurir le rameau séculaire sur le tronc vénérable de l’art chrétien ?».
Délibérément nouvelle, l'oeuvre de BENE, présentée ci-dessous, est une réponse à ces questions.


Née du regard de l’artiste BENE, cette sculpture présente un marcheur, dépouillé, au repos, les bras posés sur le bourdon qu'il porte sur la nuque, en travers sur ses épaules. La position fait immanquablement allusion au Christ sur la croix car à quelques mètres, on verra d’abord une crucifixion. Mais non, il s’agit bien là de saint Jacques, 1er apôtre martyr de la Chrétienté représenté en pèlerin. Fatigué de sa marche, il est en appui sur la jambe gauche, légèrement fléchie, et soulève la jambe droite dans la position de repos habituelle. Une discrète coquille couronne son bourdon. Mais, en dehors de cela, il ne porte aucun des attributs habituels du pèlerin. Cette sculpture offre ainsi une double lecture qui rend cette œuvre profonde et attachante et rappelle le martyre de l’apôtre.
Pleine de sens et d’originalité, elle crée la surprise. Mais il suffit de s’en approcher pour que l’émotion dégagée par l’oeuvre prenne une nouvelle dimension. En effet, la matière qui la constitue est un amalgame de plus d'un demi-millier de croix de chapelets. Analogie qui exprime que, dans la souffrance du Christ, saint Jacques trouve la force, car il est solidement habité par la foi.

Le symbolisme des innombrables crucifix renforce ici l’évocation de la croix du calvaire. Ils témoignent des souffrances portées par nombre de pèlerins sur leur chemin. Ces croix sont des croix de chapelet. Constituant une figure de saint Jacques, elles le relient au culte marial et rappellent les interventions de la Vierge dans sa prédication et le témoignage qu'il nous a laissé d'Elle dans son Protévangile.
L’artiste a poussé le détail jusqu’à utiliser une croix, probablement la plus grande, pour couvrir le front et le nez afin d’évoquer le heaume que portaient les croisés. Cette figure combattante peut aussi faire penser au Matamore et à la croisade que fut la Reconquista. Mais l'évocation de la croix montre bien qu'il s'agit ici de combat spirituel.
Une interprétation originale et d'un symbolisme  profond, qui a su respecter et aussi rappeler les vraies valeurs que représente le pèlerinage de Saint-Jacques de Compostelle.

Il existe actuellement deux versions de cette oeuvre contemporaine.
Les premières séries en bronze et argent, de presque un mètre de hauteur (650x 840), numérotées de 1 à 10, sont destinées aux églises, monastères ou autorités religieuses ou aux grands collectionneurs.

Un tirage en résine patinée vieil argent, sera décliné en deux dimensions :
- la première à la taille des originaux, pour des collectivités ou des particuliers
- la seconde d’une hauteur ne dépassant pas 30 cm, pour les pèlerins en souvenir de leur pèlerinage et pour tous ceux qui portent une dévotion à saint Jacques ou dont il est le patron.

La première exposition de cette pièce était à la chapelle Saint-Jacques de Mantes-la-Jolie, où des pèlerins ont pu apprécier l'original, beaucoup plus impressionnant en volume.

Nous vous tiendrons au courant des lieux où l’original de cette oeuvre sera très bientôt exposé.

Thierry Bénénati, alias BENE, a fait les Arts Appliqués à Marseille où il est né. Directeur artistique et réalisateur dans la Publicité à Paris, il a été également auteur pour la société Gaumont. Le côté éphémère de la publicité l’a poussé à entreprendre une carrière où les créations sont plus pérennes et purement artistiques. L’esthétique et le réalisme de ses sujets tournent toujours autour d’un décalage, d’une idée, d’un anachronisme. Le message est poétique ou humoristique. Si le style rappelle les études classiques du XIXe, le côté décalé de son œuvre l’inscrit dans l’art contemporain. Il réalise essentiellement des pièces uniques en acier. Aujourd’hui le grand comédien Gérard Depardieu s’intéresse de très près à la carrière de cet artiste dont il a acquis quelques pièces.
BENE s’exprime aussi très bien avec le bronze. Comme pour cet Esprit de saint Jacques. La technique de fonte « à la cire perdue » représente pour le sculpteur un travail plus en douceur. Les effets de matière sont moins torturés. Mais l’esprit décalé de l’artiste est toujours là.




 



Vendredi 25 Juin 2010 | Commentaires (0)