Institut recherche jacquaire (IRJ)
PATRIMOINE CONTEMPORAIN
La création artistique au long des chemins de Compostelle a été encouragée par le Conseil de l'Europe lorsqu'il a défini ces chemins comme premier Itinéraire Culturel Européen. L'exploitation commerciale de l'engouement pour Compostelle par des promoteurs peu scrupuleux auprès d'organismes politiques ou administratifs incompétents a conduit à l'éclosion d'un grand nombre d'oeuvres dans une importante surenchère de ronds-points, statues ou compositions diverses.

Dans le cadre de ses recherches, Denise Péricard-Méa avait rencontré l'abbé Branthomme à propos de ce film et il lui en avait confié une copie.
Après la création de l'IRJ, elle s'est rapprochée du service de l'Eglise qui en a hérité pour retrouver les bobines originales. Cette recherche ayant abouti, les modalités de sa mise à disposition de l'IRJ pour l'information des pèlerins ont été définies.
Avec l'autorisation du service propriétaire, elle a présenté ce film à la seconde rencontre mondiale des associations jacquaires.


Comme tout document historique, ce film doit être analysé dans le contexte de sa production pour en donner les clés de lecture.
La visite d'un monument historique et ce film en est un, gagne à être accompagnée par un guide qui fait découvrir les détails de sa construction et la richesse de ses décorations.

Les commentaires des spectateurs des premières présentations ont convaincu l'IRJ de la nécessité de ne pas projeter ce film sans information préalable.

 Denise Péricard-Méa, docteur en histoire,
co-présidente de l’Institut de Recherche Jacquaire,
ayant assisté à la dernière présentation du film
par l’abbé Branthomme, en octobre 1999 présente Chemin de Compostelle

Ce film est un document d’archives d’une valeur exceptionnelle. Tourné en 1951, inspiré par le Codex Calixtinus, il est à la fois témoin de l’état du Camino francés à cette époque et héritier des hypothèses de savants français enthousiastes du début du XXe siècle. Il montre une Espagne d’un autre temps, d’avant les grandes transformations modernes. Il développe, dans un style lyrique, propre à l’époque, une approche à la fois historique, liturgique et esthétique du pèlerinage et du patrimoine. Replacé dans son contexte il s’avère d’une lecture beaucoup plus complexe que celle d’un document sociologique.
En 1999, j’ai assisté à la dernière présentation de ce film, Chemin de Compostelle, faite par son réalisateur, l’abbé Henry Branthomme, alors âgé de 92 ans. Et il l’a commenté tout au long de la projection, puis il a longuement répondu à toutes les questions.
En 2003, il m’a confié une copie de ce film, qu’il me semble indispensable d’accompagner d’une introduction reprenant le plus fidèlement possible les paroles de l’abbé.

L’abbé Branthomme a découvert Compostelle pendant la seconde guerre mondiale, alors qu’il était prisonnier dans un stalag en Allemagne. Un stalag n’est pas un camp de concentration. Les officiers étaient traités, plus ou moins, selon les lois internationales. Ils avaient par exemple cette possibilité de se réunir pour des raisons culturelles, ce qui les aidait à tromper l’ennui et le spleen.
Un jour ont été présentés les travaux de deux érudits traitant du pèlerinage à Compostelle dans les Chansons de gestes, aucun des deux n’ayant même eu l’idée de se faire pèlerin. Dès ce jour, l’abbé a rêvé d’y aller quand la liberté lui serait rendue et cette idée lui a donné de l’espoir.
Après la Libération, nommé directeur des pèlerinages pour le diocèse du Mans, il a organisé un premier pèlerinage en 1949, au cours duquel est née l’idée du film. Son ami le cinéaste Robert Chateau a adhéré tout de suite à ce projet de tournage d’un pèlerinage qui devait se terminer à Compostelle le 25 juillet.
Les relations France-Espagne n’étaient pas au beau fixe, même si les frontières, fermées en 1946, étaient réouvertes depuis 1948. Même si Franco, le 25 juillet 1948, avait déclaré à Compostelle son désir de
« voir les chemins de Saint-Jacques s’ouvrir jusqu’au-delà du Rideau de fer ».
C’est seulement en 1950 qu’un ambassadeur français a été envoyé à Madrid.
Pour entrer en Espagne, l’abbé Branthomme a ainsi dû effectuer de nombreuses démarches pour obtenir les autorisations nécessaires.
L’équipe de tournage est donc partie plus tard que prévu, à la mi-juillet 1951. Dès le passage de la frontière, ils ont été très surveillés par la Guardia civil qui les suspectait d’espionnage.
A cause de ce retard, le tournage a commencé à Compostelle par ce qui devait être la fin.

Le matin du 25 juillet, l’équipe s’est installée dans la cathédrale au moment des préparatifs de la messe solennelle. L’abbé a brossé un tableau pittoresque des fils électriques qui serpentaient partout dans la nef et du mécontentement des chanoines devant ces intrus occupant la place dont ils avaient
besoin.
Puis tout le chemin a été tourné à l’envers, sur le chemin du retour… L’équipe voyageait dans un petit autocar que l’on voit quelques fois dans le film.
Ils ont parfois été accompagnés de René de La Coste-Messelière, alors à la Casa Velasquez à Madrid, qui s’était joint à eux comme conseiller technique. Ses rapports avec le groupe n’ont pas toujours été au beau fixe ! C’est lui le « pèlerin » qui marche et que l’on voit de dos, mains dans les poches ou portant un sac à dos.
Pas de scénario, pas d’acteurs, pas de dialogue, un reportage, Robert Chateau a filmé, pendant deux jours, le Botafumeiro bien sûr, et les fameux géants de Compostelle sortant de la cathédrale, ayant participé à la messe solennelle, etc… Puis le cinéaste a filmé tout au long de la route les monuments les plus connus et aussi des scènes de la vie en Espagne. Il choisissait évidemment tout ce qui lui semblait le plus dépaysant par rapport à la France, scènes de la vie courante et scènes de jours de fête, prises sur le vif. On y voit les familles de paysans affairées dans les champs au moment des moissons, hommes et femmes partageant le travail. Et les routes poussiéreuses, les rares voitures et les chars galiciens…
A Foncebadon, ils ont rencontré le médecin du village qui leur a raconté la fonction de la croix qu’il venait de relever, bien différente de celle qui a cours aujourd'hui !
Toutes ces images constituent un témoignage réellement historique, mais qui n’est pas l’essentiel du propos, le but de l’abbé Branthomme n’étant pas de réaliser un reportage sur l’Espagne d’après-guerre. Pour lui, le Camino était bien plus qu’un moyen de communication pour se rendre à Compostelle. Les images n’étaient là que pour servir de support à son rêve caressé pendant ses années de captivité. Rêve de ressusciter les pèlerinages médiévaux. Rêve d’une paix durable entre tous les pays d’Europe. Enfin, il voulait rendre grâce à Dieu pour sa liberté retrouvée.

Au retour a commencé le montage, en faisant référence au Codex Calixtinus sur lequel il s’ouvre. Et c’est déjà un grand moment car ce sont les seules images conservées du Codex avant sa restauration de 1965. Le film montre en particulier l’image du « Songe de Charlemagne » à moitié déchirée mais dont il subsiste un très précieux morceau de sa couronne. Les images ont été montées, bien sûr, dans le sens où marchent les  pèlerins. 
Pour leur donner une âme, l’abbé Branthomme a fait appel à son ami Denys de La Patellière, alors jeune assistant-réalisateur des grands cinéastes du moment. Mais il ne connaissait rien de Compostelle ! De longues conversations se sont engagées entre les deux hommes.
Sur le Camino francés déjà grignoté par des constructions modernes, vide de pèlerins, ils ont mis un rappel de l’histoire telle qu’on la supposait à l’époque. Au fil des étapes, ils font revivre un peuple d’ombres venu de loin, les troupes de pèlerins réunies à Puente la Reina et les « Saint-Jacquaires » construisant ponts et hôpitaux pour leurs successeurs.
En fait d’éléments historiques, ils donnent l’avis du Guide du pèlerin sur le rio Salado et sur les Navarrais, racontent le Pendu-dépendu du Livre des miracles. 
Ils citent abondamment la Chronique du Pseudo-Turpin (Charlemagne, Roland, Roncevaux, la bataille des lances fleuries, etc). Et aussi l’Historia compostelana à propos de la tête de saint Jacques à Carrion de los Condes.

Le résultat est le film d’un pèlerinage religieux, celui dont l’abbé Branthomme a rêvé derrière les barbelés. C’est dit dès le début « ce chemin mène à Dieu » et les références aux Ecritures sont nombreuses, bien qu’elles ne soient jamais nommées. Les pèlerins prient la Vierge, récitent le Salve Regina, détaillent les images de la mort de la Vierge sur les tympans, etc.
René de La Coste-Messelière a décrit parfaitement le dessein de l’abbé dévoilé au fur et à mesure du déroulement du tournage :
« Ce n’est pas un hasard si le film Chemin de Compostelle […] se déroule comme une messe à l’ancienne : Montée à l’autel devant le Christ allemand du XVe siècle de l’hôpital roman de Puente la Reina. Evangile de pierre de la cathédrale de Burgos. Offertoire de la trilla (criblage de la moisson) entre León et Astorga, Elévation au Cebreiro, avant l’allégresse de la Communion finale de Compostelle ».
La voix off et la musique du film se chargent de confirmer ce dessein. Elle est celle du comédien Michel André, ancien combattant comme l’abbé Branthomme et comme Denys de La Patellière. Sa voix est celle des commentateurs des actualités de l’époque (cinéma ou radio) mais aussi, si l’on y prête attention celle, plus emphatique, des grands prédicateurs, quand il cite des passages de l’Apocalypse, de l’Evangile de saint Luc, d’Ezéchiel…
Enfin, la musique d’orgue, très solennelle, accentue le caractère liturgique de l’œuvre. Elle accompagne les temps de méditation qui suivent les citations, en même temps qu’elle souligne la longueur de la route. Elle a été composée, elle aussi, au fil de la projection des images, par Pierre Cochereau, organiste de la cathédrale du Mans et ami de l’abbé Branthomme. (Plus tard, son talent lui valut de devenir organiste de Notre-Dame à Paris).

Denise Péricard-Méa au début de la projection (photo El correo Galego)
Denise Péricard-Méa au début de la projection (photo El correo Galego)
 

Ce film est un témoignage unique et sincère, une belle pierre brute qui chante le bonheur de l’après-guerre et qui en remercie le Ciel. Il est aussi une invitation à partir.
Et, peu à peu, les pèlerins français sont repartis. Il est piquant de constater qu’en ce même 25 juillet 1951 se déroulaient les fêtes du millénaire du pèlerinage de Godescalc… Aucun des deux groupes ne parle de l’autre…
Qu’importe ! La France s’était remise en marche, l’Europe a suivi.
Même si la qualité des images a souffert du temps, de la copie en VHS puis en CD, ce film reste une balise importante dans cette reprise.
Denise Péricard-Méa
Co-présidente Institut de Recherche Jacquaire
Juillet 2023

Ce film, propriété des Archives de l'Eglise de France, n'est pas disponible pour des présentations commerciales. 
L'IRJ étudie avec les responsables de la conservation du film les moyens d'en assurer des présentations dans le cadre de ses activités, en relation avec les associations jacquaires en particulier.


Mercredi 8 Novembre 2023 | Commentaires (0)

Le rêve de l'inscription de Villeneuve d'Aveyron au Patrimoine mondial est-il réalisable ? Le serait-elle seule ou regroupée avec d'autres monuments ? Poser cette question permet d'avancer une proposition.


Au moment d'écrire cet article, j'ai eu envie d'aller voir ce qu'il est dit de Villeneuve d'Aveyron sur Internet.
Premier site visité :
http://villeneuve-aveyron.com/les-peintures-murales/
Deuxième visite, Google annonce bastide médiévale. Sans porter attention à l'URL, je vais voir ce site, intéressant, et cherchant ce qui m'intéresse dans la rubrique histoire, je trouve cette page :
http://hotel-lion-or.com/aveyron/saint-jacques-de-compostelle/

Villeneuve sur les chemins de Saint Jacques de Compostelle ?

Depuis le début du XIV ème siècle, la chapelle romane du Saint-Sépulcre est ornée de peintures qui s’inspirent de la thématique du pèlerinage à Saint-Jacques de Compostelle. Elles situent Villeneuve comme une halte sur le chemin de  Compostelle.
Ces peintures racontent un miracle dont ont bénéficié des pèlerins. Ce miracle a été attribué à saint Jacques pour la renommée de Compostelle. Il est aussi attribué à la Vierge. Mais pourquoi en déduire que Villeneuve est une halte sur les chemins de Compostelle ? C'est raisonner au XXIe siècle comme à la fin du XIXe.

Je trouve aussi cette information : 
La partie romane de l’église s’orne des peintures murales du 14e siècle, représentant des scènes du pèlerinage de St Jacques de Compostelle, notamment la célèbre légende du pendu dépendu.
Sans être complètement fausse, cette information est assez approximative. Certes les rédacteurs de ce genre de sites ne peuvent être spécialistes de tout. Mais il y a des spécialistes qui passent leur temps à amasser des informations. pourquoi ne sont-ils pas interrogés ?


Me voila donc lisant l'histoire de Compostelle. Bien sûr  je la connais mais en lisant, j'ai l'impression de la savoir par coeur. Curieux, je fais une recherche sur Google. Elle me montre que c'est moi qui l'ai écrite, sur la page :
http://www.saint-jacques.info/2004.htm#origines
A défaut de consulter les spécialistes, il est plus facile de les copier. Il serait plus agréable pour eux d'être cités.

Il est dit couramment aujourd'hui que les 71 monuments choisis en 1997 pour représenter les chemins de Compostelle en France sont des biens en série.
Ce concept serait mieux adapté au cas de Villeneuve d'Aveyron et de la représentation qu'elle possède du miracle du pendu-dépendu. Voila un élément caractéristique commun à plusieurs localités qui pourrait permettre une réflexion au niveau européen et peut-être au delà.
Certes la référence à un miracle chrétien n'a pas valeur universelle. Mais un des modèles de biens en série est donné par les églises jésuites en Amérique du Sud. Tous les espoirs ne sont-ils pas permis ?

Lieux où se trouve une représentation du miracle du pendu-dépendu (carte de Janine Michel)
Lieux où se trouve une représentation du miracle du pendu-dépendu (carte de Janine Michel)
L'ensemble des monuments de ces lieux constitue un bien en série au sens le plus strict défini par l'UNESCO  (ref : WHC-10/34.COM/9 du 31 mai 2010) :
Ils appartiennent :
a) au même groupe historico-culturel
b) au même type de bien caractéristique de la zone géographique ;
c) ... à la même province biogéographique,
Ils reflètent des liens culturels, sociaux, historiques clairement définis dans le temps.
Prendre contact avec ces localités et les mobiliser prendra du temps mais l'inscription a une chance de se trouver au bout de la démarche. Sans doute plus qu'en imaginant une inscription au titre des chemins de Compostelle. Au demeurant les habitants de Villeneuve ne regretteront pas l'ouverture qu'ils trouveront dans ces contacts internationaux (qu'ils ont peut-être déjà ?).


Mardi 1 Août 2017 | Commentaires (0)

La réalisation collective de ces fresques par de jeunes artistes de milieu modeste, élèves de l'Ecole municipale de dessin (80, bd du Montparnasse), dirigés Robert Lesbounit, directeur de l'école s'est échelonnée de 1947 à 1953.
Cinq d'entre elles, encadrées par deux plus petites concernent la vie de l'apôtre. Elles sont situées sur le bas côté gauche de l'église. Les scènes de la vie de l'apôtre sont miess en relation avec des scènes de l'Ancien Testament et de la vie contemporaine de l'époque de leur réalisation (1947)
Leur description est extraite de la présentation qui en a été faite par Jacques DEPAUW dans le fascicule qu'il a consacré à l'église Saint-Jacques de Montrouge.


Le jeune apôtre qui accueille
Le jeune apôtre qui accueille
Cette fresque est malheureusement peu visible, au-dessus de la porte latérale. Mais quel élan dans ce personnage !
Le bourdon en main il s'élance, sans doute d'abord sur les routes de Galilée. La légende lui attribue ensuite l'Occident, parfois désigné sous le nom d'Hispanie. Ce pourrait être aussi l'Irlande. S'agissant de l'Espagne, il serait venu d'abord sur la côte Sud, évangéliser des communautés juives installées depuis longtemps.
Déjà une coquille sert de fond à ce personnage, symbole de la vie nouvelle qu'il va prêcher.

La vocation de saint Jacques
La vocation de saint Jacques
Au centre, Jésus appelle Jacques à le suivre. Zébédée est assis nu dans la barque. Jacques est reconnaissable à la coquille qui ferme son vêtement.

La mission de Jacques
La mission de Jacques
Au milieu, Jésus est dans une barque avec trois apôtres. L'un, penché, attrappe une main qui sort d'un filet.
A doite, ces paroles :" je vous ferai pêcheurs d'hommes ". A côté, Jésus et un groupe de quatre apôtres dont Jacques.

Les ambitions de la mère de Jacques et Jean
Les ambitions de la mère de Jacques et Jean
Au centre, Marie Salomé, mère des deux apôtres demande à Jésus de donner à ses fils, agenouillés une place d'honneur dans son royaume. Derrière elle les apôtres sont scandalisés. La main gauche de Jésus tient le calice du martyre que Jacques subira.

Pierre, Jacques et Jean au jardin des oliviers
Pierre, Jacques et Jean au jardin des oliviers
Vêtu de sombre, alors que sur les autres fresques il est en blanc, Jésus découvre ses apôtres qui se sont endormis.
Au-dessus de cette scène, c'est l'arrestation de Jésus. L'un des soldats a une coiffure qui rappelle celle de la Guardia civil de Franco.

Le martyre de saint Jacques
Le martyre de saint Jacques
Au centre la décapitation de saint Jacques. Assis, Hérode (en rouge) donne du doigt l'ordre de tuer saint Jacques agenouillé.
Derrière lui, le magicien Hermogène, converti, représenté plus petit, va subir le même sort. Le bourreau s'apprête à frapper. La main de Dieu, enveloppe les martyrs de sa lumière.

Saint Jacques à Compostelle
Saint Jacques à Compostelle
A l' autre extrémité des fresques, saint Jacques plus âgé est assis, tenant la cathédrale de Compostelle sur ses genoux.
Sur le panneau en angle, une représentation des chemins de Compostelle en France, présentée dans l'article sur l'église Saint-Jacques de Montrouge.
Les fresques majeures sont imprégnées de références bibliques et en résonance avec des épisodes de la vie contemporaine de leur époque.
Ces deux dernières le sont aussi mais elles sont influencées par la décision du pape Léon XIII de reconnaître les reliques de saint Jacques à Compostelle en 1884. Elles reflètent aussi les idées des années 1930 sur les chemins de Compostelle comme en témoigne cette carte, inspirée de celle que Francis Salet avait fait peindre sur un mur du musée des monuments historiques.
Saint Jacques vieillissant est en passe de devenir Galicien, bientôt, il sera désigné comme saint Jacques-de-Compostelle. Les pèlerins vont oublier qu'ils vénèrent un Galiléen.

La première mention d’une église Saint-Jacques à Montrouge date de 1533. Interdite au culte pour vétusté, elle fut détruite en 1677, remplacée par une autre qui connut le même sort en 1809. Une troisième église Saint-Jacques, construite entre 1823 et 1828, fut démolie pour l’aménagement de l’actuelle place de la Libération. Elle était à l’emplacement de l’esplanade sur laquelle ouvre l’église neuve inaugurée le 5 décembre 1939. Menacée à son tour de démolition, cette dernière est aujourd'hui sauvée.


L'église Saint-Jacques de Montrouge, façade Ouest
L'église Saint-Jacques de Montrouge, façade Ouest
En 2005, nous attirions l'attention sur la menace de démolition qui pesait sur l'église saint Jacques de Montrouge. Le prolongement de la ligne 4 du réseau de Métro de Paris au-delà de la Porte d'Orléans avait aiguisé les appétits des promoteurs. Cet immense parallépipède de béton de la fin des années 1930 dont les armatures rouillées apparaissaient çà et là et qui, du reste, n'avait jamais été terminé était devenu trop grand pour une communauté paroissiale rétrécie. Pourquoi alors ne pas en faire un centre commercial ? Il aurait été merveilleusement situé avec le Métro à sa porte et correspondait mieux qu'une église aux envies des investisseurs.
Voir notre appel de 2005
Quelques paroissiens furent heureusement indignés par cette perspective et réussirent à faire classer leur église à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques. Saint-jacques de Montrouge entrait ainsi dans la catégorie des " immeubles qui, sans justifier une demande de classement immédiat, présentent un intérêt d'histoire ou d'art suffisant pour en rendre désirable la préservation ".
Ce fut une première victoire de l’Association des amis de l’église Saint-Jacques à Montrouge constituée sous la présidence de Jacques Depauw, maître de conférence honoraire en histoire moderne et spécialiste d’histoire de l’art qui sut mobiliser les défenseurs de l'église, en particulier au sein de la Municipalité.

Voir les articles parus dans un magazine local  Montbouge .info :
L’église Saint-Jacques se défend et
L’église Saint-Jacques. Une démarche patrimoniale

L'église rénovée, projets d'éclairages extérieurs
L'église rénovée, projets d'éclairages extérieurs
La publication de la Municipalité, Montrouge Magazine, n° 95 de novembre/décembre 2011 a annoncé le projet de restauration de l'église Saint-Jacques. Une réunion d'information a eu lieu le 16 décembre 2011 à l'église.
Le cabinet Galtier, choisi pour définir et conduire les travaux en a présenté les grandes lignes.
La première phase concernera les infrastructures de l'église qui sont détériorées par la présence dans le sol de produits chimiques, résidus d'une ancienne tannerie ayant existé en ce lieu. Elle devrait commencer à l'été 2012.
Suivront la réfection de la structure du bâtiment, avec une technique différente de celle qui avait été utilisée au début des années 1980. Les résines qui il y a 30 ans semblaient être une panacée n'ont pas tenu leurs promesses. Les techniques d'aujourd'hui sont plus respectueuese de la nature du matériau d'origine, le béton. Deux autres phases suivront avec des travaux de modernisation des installations vétustes : chauffage et électricité.
A propos du chauffage, l'assistance a eu la surprise d'apprendre que l'installation proposée de panneaux solaires sur le toit de l'édifice (toiture plate à plus de 20m de hauteur) avait été refusée par l'administration des Monuments historiques. Décision incompréhensible dont l'obscurantisme apparent fait frémir.
Divers travaux d'aménagement, en particulier la mise en place d'un nartex vitré permettront aux voyageurs sortant du Métro de découvrir l'édifice dont les vitraux seront, la nuit venue, éclairés de l'intérieur.
Les plus optimistes pensent que les travaux devraient être réalisés en trois ans. le maire de Monrouge, présent lors de la présentation a confirmé la volonté de la Municipalité de prévoir les crédits nécessaires dans les budgets d'investissements, en exprimant l'espoir que les subventions, en particulier celle de la DRAC seraient reconduites.

L'existence d'un retable couronné par un saint Jacques à cheval dans la chapelle privée de la propriété Vista Alegre où Jaime Figueras a été accueilli en 1948 nous a conduits à essayer de mieux connaître cette propriété. Aujourd'hui intégrée dans l'université, elle a appartenu à une famille dont l'ancêtre a été une figure de Compostelle. Sa petite-fille Mercedes, qui avait dix ans au moment de l'accueil des pèlerins, a évoqué dans un article précédent ses souvenirs de 1948. Elle raconte ici l'histoire de cette maison et témoigne de l'héritage que lui a transmis sa famille, représentative d'une fraction influente de la société compostellane.


En 1796, le lieu apparaît sur un plan de la ville, sous le nom « Jardins de Saint-Martin », sous une forme semblable à celle d’aujourd’hui. En 1898, il a été acheté par mes grands-parents, qui sont venus des montagnes de Los Cameros près de Logroño* . La maison a été inaugurée en 1903. Construite avec compétence et amour, elle est une véritable expression d'un mode de compréhension du monde, d’une culture riche et plurielle : solide à l'extérieur, chaleureuse et confortable à l’intérieur. On la dit sobre et élégante… tour à tour silencieuse et animée. Elle fut construite avec des matériaux et techniques appropriés et, je suppose, par des maîtres d’œuvre réputés. Elle est entourée d’un mur de pierre garni de mousses et de lichens, marquant une séparation très nette entre l'intérieur et l'extérieur, créant son propre monde. La promenade conduit vers les arbres fruitiers, pelouses, arbustes et plantes à fleurs placés dans un désordre apparent, puis vers les champs de maïs et la célèbre chênaie proche d’un ruisseau qu’on enjambe par deux petits ponts.



Mais le joyau de la maison est sa chapelle, construite, dans les années 1940,  à la mesure d'un grand et magnifique retable baroque galicien du XVIIIe siècle acheté par ma grand-mère. Le Baroque est un des points forts de l'histoire de l'art galicien, particulièrement en ce qui concerne les retables et l'architecture développée à partir du milieu du XVIIe siècle. Depuis le roman, si riche sur le chemin de Saint-Jacques, on n'avait pas assisté à un tel désir de renouvellement dans l’art religieux. Ce baroque galicien est connu pour être léger et avoir éliminé tout excès dans l’expression comme on trouve dans le roccoco. Il entretient une relation étroite avec le classicisme. On considère comme très important dans de tels retables la fusion du baroque avec la couleur et la fantaisie des peintures indigènes de l’Amérique espagnole. Cela leur donne un caractère et un sens artistique uniques dans l'histoire de l'art.



Le retable étant dépourvu de statues, ma grand-mère en a commandé d’autres dans les ateliers de Barcelone Claudio Rius en 1945. Elle voulait que ses enfants soient représentés sur l'autel : de gauche à droite et de haut en bas, Jean Népomucène, Pierre, Elizabeth, Acisclo (mon grand-père) et Carmen. Sa fille Rosario est située sur un côté de l'intérieur du Tabernacle. Au centre le Sacré-Cœur préside à la vie familiale. Et pour couronner le tout, l’apôtre Jacques à cheval, à l'arcade supérieure. Dans le chœur, mon frère José Luis a joué de l'harmonium et nous avons chanté dans les fêtes de famille, mariages, communions, anniversaires et lors des décès.

Dna. Isabelle, la grand-mère
Dna. Isabelle, la grand-mère
Vista Alegre, tout en étant importante dans le passé et le présent, est encore plus prestigieuse par sa mission qui a été de se mettre au service de la ville de Santiago et de ses habitants, à travers l’œuvre effectuée par mes ancêtres. Mon grand-père était connu pour sa charité et son sens de la justice. Il est décédé en 1905 à l'âge de 39 ans. Ma grand-mère était âgée de 33 ans et avait cinq enfants, dont mon père âgé d’un an. Elle a alors repris l'entreprise familiale tout en cherchant à promouvoir et à renforcer sa ville bien-aimée par un soutien progressif et croissant.

1920 : elle pose la première pierre de l'école gratuite des Frères De La Salle
1924 : elle fait la donation et inaugure la chapelle du Collège de Placeres des Révérends pères du Sacré-Cœur.
1935 : elle est le concepteur et le promoteur de l’aéroport de Lavacolla.
1949 : elle fonde la « Bibliothèque des bonnes lectures » avec 2 250 volumes, ouverte aux personnes à faible pouvoir d'achat. Elle est actuellement encore en activité.
1951 : elle fait une donation et construit le sanatorium de Notre-Dame de l'Espérance, géré par le RR de La Esperanza de Lorette.
1951 : Construction Cottolengo du Père Alegre, refuge pour les malades, démunis ou pauvres abandonnés.

Ce sont ses œuvres connues et datées. Il en existe d'autres qui sont difficiles à dater et à exposer.
A titre d'exemple, elle a encouragé le sanatorium psychiatrique de Conjo, ou la résidence des étudiants Colegio Mayor La Estila. Et, plus secrets, nous avons appris peu à peu sa création de bourses d’études, son aide à la presse compostellane, comme El Correo Gallego, sa sollicitude pour l’Archiconfrérie de l’apôtre saint Jacques, ses attentions au service liturgique des pauvres églises rurales. Tous, elle les aidés de conseils, avec sagesse et compassion chrétiennes, privilégiant l’intérêt des autres plutôt que le sien propre. Elle s’est montrée une femme de son temps, sans jamais ménager ses efforts.


Vista Alegre, la maison et son âme
Comme si les actes de ma grand-mère semblaient ne jamais devoir finir, je tiens à en mentionner deux que je connais depuis mon enfance et dont j’apprécie la valeur :
    1e Au cours de la guerre civile espagnole a pris une décision qui ne pouvait émaner que d’un esprit comme le sien. Beaucoup de jeunes filles et de jeunes mariées se sont retrouvées seules parce que les hommes étaient au front. Elle a pensé qu’elles devraient gagner leur vie si elles se retrouvaient veuves. Dans la belle galerie de la maison, elle a installé un mobilier adéquat et recruté des enseignants spécialisés dans la couture, le travail de l’argent repoussé, le travail des azabaches, traditions locales de Santiago. De cette façon, elles ont appris un métier et appris à communiquer entre elles.
    2e Dans la Galice de son époque, le niveau d'éducation était très faible et la petite propriété empêchait le développement économique des campagnes. Consciente de cette réalité, pendant les mois d’été, tous les mercredis elle faisait venir à la maison un avocat ou un notaire qui recevaient les gens qui venaient consulter pour leurs problèmes et les aidaient à rédiger un testament. Pendant ce temps nous, les petits-enfants qui étions en vacances à Vista Alegre, savions que ce jour de la semaine devrait être consacré à distraire les enfants de ces familles venues demander des conseils. De cette manière, nous avons appris, les 15 petits-enfants, comment aider sans forfanterie un monde qui souffre et qui a besoin de charité mais surtout d’écoute, de gentillesse et d’affection.

Plaque commémorative de Dna. Isabelle et de sa famille
Plaque commémorative de Dna. Isabelle et de sa famille
Dès 1924, la ville de Santiago la déclarait sa Fille Favorite
« pour les œuvres qu’à son bénéfice vous avez réalisées et pour le même amour que vous avez montré à votre cité » (Discours prononcé par le maire José Díaz Varela-Losada).

En 1950, elle a reçu de Sa Sainteté le Pape Pie XII la haute distinction de la Croix Pro Ecclesia et Pontifice « pour ses services exceptionnels rendus à l'Eglise… ».
En 1954, la ville de Santiago lui décerna la Croix d'Argent.

Le 23 août 1956 Dna. Isabelle mourut. Elle était née la nuit de Noël 1872.
Santiago a été paralysé. Les magasins étaient fermés et les gens sont descendus dans les rues pour accompagner en pèlerinage ma grand-mère bien-aimée Isabelle de Vista Alegre, à travers toute la ville en passant devant la cathédrale, jusqu’au cimetière.

Ses enfants ont été en mesure de poursuivre son travail avec respect comme un héritage sacré et un engagement historique. Ses petits-enfants et arrière petits-enfants ont reçu en héritage le charisme et la grâce, ils sont appelés à porter ses fruits dans notre vie au service et pour les plus vulnérables. Je ne peux m’étendre excessivement sur mon histoire. Mais dans cette société très individualiste dans lequel nous vivons, j’essaie de savoir quoi faire en analysant les actions de ceux qui ont établi une ligne droite et honorable. Je pense, en essayant d'adapter mon comportement à la situation de chacun, être un aiguillon, un exemple et une aide.


En 1997, le Consortium de la ville, dans le but de réaffirmer l'engagement européen de l'Université de Santiago, à l’occasion de son 500e anniversaire, a signé un acte d’expropriation de la Villa Vista Alegre. Elle a été transformée en campus universitaire, avec trois pavillons modernes abritant le premier un centre d’Etudes Avancées, le second un Centre d’études musicales et le troisième l’Institut des études galiciennes.
La maison, maintenant appelé « Maison de l'Europe », est devenue une résidence pour les enseignants d'autres universités à travers le monde, participant à l'enseignement et à la recherche.
Tout cela est dans un parc et source de fierté pour l'Université qui partage cet espace avec des universitaires pèlerins privilégiés de l'Europe en Galice. Et le peuple espagnol a estimé utile cette communication fructueuse avec d'autres universités à travers le monde.

La grande douleur de voir à jamais fermée la porte de notre chère et aimée maison est tempérée par son devenir, dédié à une oeuvre sociale, académique et, puis-je le dire, universelle ?
Il est temps d'appliquer ce que j’ai appris à Vista Alegre.

Plan actuel de la propriété
Plan actuel de la propriété

Il est temps d'appliquer ce que j'ai appris à Vista Alegre :

Se souvenir du passé avec gratitude.     
Vivre aujourd'hui avec passion.     
Voir l'avenir avec espoir




Mercredi 2 Février 2011 Mercedes Sáenz-Diez de la Gándara | Commentaires (0)

Récemment redécouvert par Renaud Arpin, historien de Montgeron, un vitrail de l’église Saint-Jacques de Montgeron semble témoigner d’une rare audace du curé commanditaire, de la donatrice et des Maîtres verriers franco-espagnols. Dans la représentation du martyre de saint Jacques, le bourreau ressemble étonnamment à Hitler. Acte volontaire de résistance ou hasard d'un représentation stylisée ?


Montgeron en Essonne avait une église paroissiale depuis 1247, dédicacée en 1535 à saint Jacques et saint Christophe. Devenue trop petite, elle fut détruite dans les années 1850 et une nouvelle église sous le vocable de saint Jacques fut construite en 1855, 1856.
En 1941, cette église fut dotée d’un ensemble de vitraux réalisés par l’atelier des frères Mauméjean, grands Maîtres verriers du XXe siècle. Originaire du Sud-Ouest, la famille Mauméjean oeuvra dans l’art du vitrail de 1860 à 1970. Elle avait des liens avec le pays basque et la Catalogne et deux sociétés, une en France et une en Espagne. Leurs réalisations sont très nombreuses dans ces deux pays. La famille Mauméjean fut présente dans ce métier pendant plus d’un siècle, de 1860 à 1970. En France, elle eut des ateliers à Pau, Anglet, Biarritz. En Espagne elle eut un atelier à Madrid dès 1898 puis à Barcelone et Saint-Sébastien. Plus tard, leur société prit le nom de Mauméjean Frères en France, et Mauméjean Hermanos en Espagne. L’activité cessa en 1970 à la mort du dernier descendant.
Les ateliers des frères Mauméjean ont réalisé en 1941 la décoration de l'église Saint-Jacques de Montgeron comprenant un ensemble de vitraux et des mosaïques.

Regardez bien la tête du bourreau
Regardez bien la tête du bourreau
Contrairement à ce qui est habituel, le vitrail dédié au saint patron de l'Eglise n'est pas disposé dans l'axe du choeur, il est sur la gauche.Sa scène centrale représente le bourreau s'apprêtant à trancher la tête de l'apôtre, agenouillé à ses pieds. Aucun écrit, ni commande, ni descriptif n'a été retrouvé concernant ce vitrail qui présente une particularité surprenante :  très stylisée, la tête du bourreau ne peut manquer de faire penser à Hitler. Une mèche lui barre le front, plus discrète, une moustache peut être vue sous un certain angle.

Cette composition a été mise en lumière par un jeune professeur d’histoire de Montgeron, Renaud Arpin, à l’occasion des Journées du patrimoine 2010. Elle était connue de quelques habitants mais son originalité et surtout le témoignage de l’esprit de résistance qu'il est possible d'y voir n’avaient pas été soulignés. Les maîtres verriers, le chanoine Le Couëdic, curé de la paroisse en 1941 et la donatrice Mme Dumay ont-ils volontairement couru des risques pour afficher ainsi, sous l’œil de l’occupant, le Führer transformé en bourreau ? Ou s'agit-il de l'évolution d'un style interprété soixante-dix ans plus tard ? La question est ouverte. Mais l'hypothèse de l'acte de résistance a d'emblée été acceptée par tous les commentateurs tant elle apparaît exaltante.

Hitler à l’église Saint-Jacques de Montgeron ?
La composition de ce vitrail est très intéressante. La scène du martyre est encadrée par un rappel des liens entre saint Jacques et la Vierge.
Au registre supérieur, la vierge est assise avec Jésus dans les bras.
Au registre inférieur figure la phrase du Credo des apôtres attribuée à saint Jacques :
« Conçu du Saint-Esprit, né de la Vierge Marie ».
Cette phrase borde une mandorle au centre de laquelle est représentée une barque de pêcheur avec ses filets. Est-ce la barque de Zébédée que Jacques a quittée pour suivre Jésus, rappelant l’origine de sa mission ? Est-ce l’embarcation qui conduisit le corps de saint Jacques en Galice ? La présence d’un filet fait pencher pour la première interprétation.

La barque est surmontée d’une étoile à laquelle le registre supérieur fait écho en présentant la cathédrale de Compostelle soulignée par le nom de la ville. Comment ne pas voir là l’influence espagnole de la famille Mauméjean ?
Ce n'est pas l'avis des pèlerins contemporains pour qui la présence de cette église Saint-Jacques à Montgeron est bien la preuve de l'existence d'un chemin de Compostelle passant par Montgeron, ce que confirme le vitrail.


Renaud Arpin a étudié cette question et sa conclusion est que « si l’on ne peut affirmer que notre ville eut autrefois sa place sur le chemin de Saint-Jacques, il semble qu’elle en ait une, même modeste pour les jacquets d’aujourd’hui ».

Quant à la scène du martyre elle-même, outre le personnage du bourreau il est possible de s’interroger sur le symbolisme du personnage que représente saint Jacques. Il était juif et son prénom reflète le nom de Jacob, père des tribus d’Israël ? Représente-t-il le peuple juif qu’Hitler avait entrepris d’exterminer ? Ou, plus largement symbolise-t-il les peuples soumis au joug nazi ? Il ne reste malheureusement pas d’archives connues de cette œuvre. Peut-être Renaud Arpin en trouvera-t-il un jour ?
Le registre inférieur du vitrail
Le registre inférieur du vitrail


Dimanche 23 Janvier 2011 Fondation Ferpel | Commentaires (0)

En 1950, Paul Guinard (directeur de l'Institut français en Espagne pendant 30 ans), concluait ainsi un propos sur saint Jacques et le pèlerin dans l’art chrétien :
« ... les rénovateurs de l’art religieux, depuis un demi-sièçle, semblent avoir ignoré saint Jacques. Seul le poète du Soulier de Satin et du Livre de Christophe Colomb a fait surgir sur la scène une ombre gigantesque : le "pèlerin de l’Occident ... phare entre les deux mondes ... ".
Quel maître fixera sur la toile ou sur la pierre, le saint Jacques "cosmique" rêvé par Claudel ?
Verrons-nous refleurir le rameau séculaire sur le tronc vénérable de l’art chrétien ?».
Délibérément nouvelle, l'oeuvre de BENE, présentée ci-dessous, est une réponse à ces questions.


Née du regard de l’artiste BENE, cette sculpture présente un marcheur, dépouillé, au repos, les bras posés sur le bourdon qu'il porte sur la nuque, en travers sur ses épaules. La position fait immanquablement allusion au Christ sur la croix car à quelques mètres, on verra d’abord une crucifixion. Mais non, il s’agit bien là de saint Jacques, 1er apôtre martyr de la Chrétienté représenté en pèlerin. Fatigué de sa marche, il est en appui sur la jambe gauche, légèrement fléchie, et soulève la jambe droite dans la position de repos habituelle. Une discrète coquille couronne son bourdon. Mais, en dehors de cela, il ne porte aucun des attributs habituels du pèlerin. Cette sculpture offre ainsi une double lecture qui rend cette œuvre profonde et attachante et rappelle le martyre de l’apôtre.
Pleine de sens et d’originalité, elle crée la surprise. Mais il suffit de s’en approcher pour que l’émotion dégagée par l’oeuvre prenne une nouvelle dimension. En effet, la matière qui la constitue est un amalgame de plus d'un demi-millier de croix de chapelets. Analogie qui exprime que, dans la souffrance du Christ, saint Jacques trouve la force, car il est solidement habité par la foi.

Le symbolisme des innombrables crucifix renforce ici l’évocation de la croix du calvaire. Ils témoignent des souffrances portées par nombre de pèlerins sur leur chemin. Ces croix sont des croix de chapelet. Constituant une figure de saint Jacques, elles le relient au culte marial et rappellent les interventions de la Vierge dans sa prédication et le témoignage qu'il nous a laissé d'Elle dans son Protévangile.
L’artiste a poussé le détail jusqu’à utiliser une croix, probablement la plus grande, pour couvrir le front et le nez afin d’évoquer le heaume que portaient les croisés. Cette figure combattante peut aussi faire penser au Matamore et à la croisade que fut la Reconquista. Mais l'évocation de la croix montre bien qu'il s'agit ici de combat spirituel.
Une interprétation originale et d'un symbolisme  profond, qui a su respecter et aussi rappeler les vraies valeurs que représente le pèlerinage de Saint-Jacques de Compostelle.

Il existe actuellement deux versions de cette oeuvre contemporaine.
Les premières séries en bronze et argent, de presque un mètre de hauteur (650x 840), numérotées de 1 à 10, sont destinées aux églises, monastères ou autorités religieuses ou aux grands collectionneurs.

Un tirage en résine patinée vieil argent, sera décliné en deux dimensions :
- la première à la taille des originaux, pour des collectivités ou des particuliers
- la seconde d’une hauteur ne dépassant pas 30 cm, pour les pèlerins en souvenir de leur pèlerinage et pour tous ceux qui portent une dévotion à saint Jacques ou dont il est le patron.

La première exposition de cette pièce était à la chapelle Saint-Jacques de Mantes-la-Jolie, où des pèlerins ont pu apprécier l'original, beaucoup plus impressionnant en volume.

Nous vous tiendrons au courant des lieux où l’original de cette oeuvre sera très bientôt exposé.

Thierry Bénénati, alias BENE, a fait les Arts Appliqués à Marseille où il est né. Directeur artistique et réalisateur dans la Publicité à Paris, il a été également auteur pour la société Gaumont. Le côté éphémère de la publicité l’a poussé à entreprendre une carrière où les créations sont plus pérennes et purement artistiques. L’esthétique et le réalisme de ses sujets tournent toujours autour d’un décalage, d’une idée, d’un anachronisme. Le message est poétique ou humoristique. Si le style rappelle les études classiques du XIXe, le côté décalé de son œuvre l’inscrit dans l’art contemporain. Il réalise essentiellement des pièces uniques en acier. Aujourd’hui le grand comédien Gérard Depardieu s’intéresse de très près à la carrière de cet artiste dont il a acquis quelques pièces.
BENE s’exprime aussi très bien avec le bronze. Comme pour cet Esprit de saint Jacques. La technique de fonte « à la cire perdue » représente pour le sculpteur un travail plus en douceur. Les effets de matière sont moins torturés. Mais l’esprit décalé de l’artiste est toujours là.




 



Vendredi 25 Juin 2010 | Commentaires (0)