Institut recherche jacquaire (IRJ)

Regard sur Vista Alegre, lieu d’accueil du pèlerin

A Compostelle en 1948


Rédigé par Mercedes Sáenz-Diez de la Gándara le 2 Février 2011 modifié le 2 Février 2024
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Cet article complète le récit du pèlerinage effectué par Jaime Figueras pendant l'année sainte 1948 déjà publié.
Il est écrit par la petite-fille de la personne qui a accueilli leur groupe de pèlerins catalans à Compostelle. Ce témoignage apporte un éclairage sur la vision du pèlerinage dans une grande famille compostellane.



Une tradition d'hospitalité

Vue depuis la terrasse de Vista Alegre, la bien nommée
Vue depuis la terrasse de Vista Alegre, la bien nommée
 En Espagne, voyages et pèlerinages sont une tradition. L’Espagne a navigué, ouvert des routes et découvert des continents, ce qui a marqué son histoire et sa foi. Quel motif pousse les hommes à abandonner leurs habitudes quotidiennes et se mettre en marche sur une route pleine de fatigues et de dangers ? Pour le Chemin de Saint-Jacques, la réponse ne peut pas être unique. Parmi les raisons qui poussent les gens à entreprendre le pèlerinage on trouve toujours en premier la recherche du bien ou, plus précisément, le besoin spirituel de transcendance, de rencontre avec Dieu.
Le pape Calixte II, au XIIe siècle, disait :
« Personne ne peut compter le nombre des bienfaits que l’apôtre a accordés à ceux qui le prient d’un cœur sincère. Par la grâce de Dieu, nombreux sont ceux qui y allèrent pauvres, qui furent ensuite aisés, de nombreux malades en revinrent guéris, de nombreux adversaires s’y sont réconciliés, de nombreux laïcs s’y firent moines, de nombreux avares y devinrent généreux, de nombreux usuriers y devinrent donateurs, de nombreux orgueilleux y devinrent humbles, de nombreux menteurs y devinrent véridiques, de nombreux spoliateurs y donnèrent leurs vêtements aux pauvres, de nombreux hors-la-loi y rentrèrent dans la légalité, de nombreux juges corrompus y apprirent à défendre la vérité, de nombreuses femmes stériles y devinrent fécondes, de nombreux méchants y devinrent justes » . (Codex Calixtinus, Livre I, pèlerinage en Galice)

A Santiago ne viennent pas seulement des foules en prière mais des randonneurs ou des voyageurs nés. Pour tous se dévoile la fascinante Finis Terrae et la connaissance de tout ce qui est lié au pèlerinage, en particulier les vestiges témoins du passé historique de ce qui est le « phénomène Saint-Jacques ». La beauté de la nature les accompagne tout au long de la marche

Des hôtes inspirés par le Codex Calixtinus

L'hôtesse de 1948, grand-mère de l'auteur
L'hôtesse de 1948, grand-mère de l'auteur
Et c'est là que je reviens à la demande de mon ami Jaime Figueras de compléter de mes souvenirs personnels l'histoire de son premier pèlerinage à l'été 1948.

Je me souviens de l'arrivée des garçons catalans disciplinés et corrects dirigés par le prêtre amical et célèbre, Antonio Batlle.
Même si nous avons toujours servi l'étranger en détresse, cette arrivée des jeunes gens venus camper dans notre oliveraie avec une vitalité joyeuse et saine a marqué mes 10 ans. Dans mon souvenir, nous avons préparé à l’avance cette arrivée des huit adolescents, selon ce que recommandait le Codex Calixtinus :
 
« Riche ou pauvre, le pèlerin qui va à Saint-Jacques doit trouver dans toutes les nations l’hospitalité et le respect. Car celui qui le reçoit et s’empresse de lui donner l’hospitalité n’a pas seulement pour hôte saint Jacques, mais notre-Seigneur lui-même. N’a-t-il pas dit dans son Évangile : Qui vous reçoit, me reçoit » . (Codex Calixtinus, Livre V, chap. XI, accueil à réserver aux pèlerins de Saint-Jacques).

Compte tenu de ces recommandations sérieuses et valables, mes frères et moi avons essayé de les servir avec une discrétion attentive et douce. Chaque jour, nous sommes venus près du chêne avec un panier de pommes, une cruche de lait, une barre de savon, de l'aspirine, des pansements ou des œufs frais. Je me souviens de mon frère Javier, qui avait 8 ans, revenant en disant : « Ton ami Jaime et ses compagnons ont une dette envers moi ». Je suppose que, comme il arrivait avec une corbeille de fruits, Antonio (le père Battle) lui avait donné une pièce de monnaie pour acheter des bonbons. En arrivant à la maison, heureux avec son trophée, mes parents l'avaient grondé d’avoir accepté car l'aide à un pèlerin devait être charitable et gratuite. Je le revois faisant le chemin en sens inverse, la tête basse.
Mais ce dont je me souviens le mieux, c’est la messe quotidienne du père Batlle dans la chapelle et de ses homélies pastorales. Elle se prolongeait par le petit déjeuner au cours duquel il racontait les événements de la veille et parlait du programme de la journée.

La Villa Vista Alegre, d’une superficie d’environ quatre hectares, située à l’époque à la périphérie de la ville, y est maintenant intégrée. Elle conserve son plan d’origine et en particulier ses vues privilégiées vers Saint-François et les tours de la cathédrale, qui font honneur à son nom. Je vous la présenterai plus longuement.


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