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EUROPE ET UNESCO
La reconnaissance internationale
Le Conseil de l'Europe en 1987 et l'Unesco en 1993 et 1998 ont pris des décisions politiques qui ont profondément influencé la nature du pèlerinage à Compostelle. Né de la volonté de Reconquista, il est resté un phénomène essentiellement espagnol. Les chevaliers du nord des Pyrénées partis guerroyer contre les Infidèles qui ont fait le détour par le sanctuaire galicien l'ont fait connaître à leur retour. Mais c'est la légende de Charlemagne et son action qui ont répandu sa connaissance dans toute l'Europe. Les dévotions à l'apôtre, considéré au Moyen Age comme rédacteur de l'Epître de Jacques et vénéré comme " Passeur des Ames " ont eu pour modèle l'exemple de l'empereur. De nombreux sanctuaires ou hôpitaux mis sous sa protection ont contribué à la renommée de Compostelle plus que les pèlerins faisant le voyage jusqu'en Galice. Plus largement, sont tous les pèlerinages médiévaux qui ont en fait servi de justification au Conseil de l'Europe pour faire de Compostelle leur archétype. L'Assemblée du Conseil de l'Europe l'avait décidé ainsi en 1984. La situation politique de 1987 a conduit à donner à Compostelle une importance historique symbolique tout en accentuant l'importance de chemins qui étaient ceux de tous les voyageurs.
L'ITINÉRAIRE CULTUREL EUROPÉEN
En 1987, le Conseil de l'Europe a donné une suite favorable à une demande formulée par l'Espagne en 1982. Il a désigné les chemins de Compostelle " premier Itinéraire culturel européen ", donnant une dimension européenne à un pèlerinage médiéval espagnol. Pourtant, en 1984, sa Commission de la Culture avait proposé de le choisir comme exemple parmi de nombreux pèlerinages européens médiévaux. Elle fut balayée par la nécessité de célébrer l'entrée de l'Espagne dans l'Europe démocratique. L'importance européenne de Compostelle fut affirmée, au-delà de la réalité historique du pèlerinage. Le but du Conseil de l'Europe était double,
- satisfaire une demande de l'Espagne au moment où elle rejoignait les démocraties engagées dans la construction européenne - doter l'Europe d'un projet culturel sur le thème des pèlerinages médiévaux dont Compostelle devenait un modèle. Pour cela, il s'est s'appuyé sur des hypothèses d'érudits auxquelles il a donné une valeur historique qu'elles n'avaient pas. Qui plus est, en proposant un logo, il a transformé un itinéraire symbolique en un itinéraire géographique indéfinissable, ouvrant une sorte de boîte de Pandore d'où ne cessent de sortir des chemins. LES CHEMINS EN FRANCE AU PATRIMOINE MONDIAL
En 1993, l'Unesco a inscrit au Patrimoine Mondial la totalité du Camino francés et plus de 1800 monuments ou sites en Espagne.
Une telle inscription était exclue pour la France, dépourvue du moindre chemin présentable comme historique. Mais, en 1997, survient une conjoncture favorable dans ses relations avec l'Unesco. Elle présente un dossier sous le titre " Les chemins de Compostelle en France ". Il comprend 71 monuments ou ensembles immobiliers, dits jalons sur des chemins historiques ou témoins de fonctions liées aux pèlerinages et 7 tronçons du GR 65, tracé à partir des années 1970. En décembre 1998, cet ensemble disparate, sans rapport historique avec Compostelle devient le Bien 868, ... sous le nom du dossier de présentation ! C'est gagné ! la France est comme l'Espagne ! Sinon " de quoi aurait-elle eu l'air " dit un promoteur du dossier tandis qu'un autre, plus prévoyant, déclare " on ne gère pas un mythe ", tout en rédigeant des bulletins de victoire sur des plaques de marbre à la rédaction astucieusement ambiguë. Victoire donc ! Mais 15 ans plus tard, l'Unesco menace : le Bien 868 sera considéré comme " en péril ", si les soit-disant chemins ne sont pas gérés comme des bâtiments doivent l'être. La décision politique favorable à la France se révèle inconfortable. Il faut appliquer les critères de gestion de l'Unesco aux monuments, faute de règle pour les chemins. Qu'importe ! Le ministre de la Culture prend des mesures qui satisfont l'Unesco. Il désigne alors un préfet pour coordonner l'action des départements possédant un des 71 monuments et érige en Agence l'ACIR, association mise en place par les régions du Sud-Ouest en 1990 pour valoriser les chemins de Compostelle. Une seconde difficulté apparaît. L'inscription des chemins est ancienne et les règles ont changé. La Valeur Universelle Exceptionnelle (VUE) de chaque Bien supposée acquise avec l'inscription doit dorénavant être démontrée par le demandeur. Tâche difficile. Quelle est la VUE d'un dolmen, d'une modeste nef d'église, de ponts, même anciens ? L'agence rédige cependant la Déclaration de Valeur Universelle Exceptionnelle (DVUE) demandée en apportant quelques modifications aux demandes d'origine. Et là surprise pour qui lit les documents. Devinez qui fait les frais de la VUE des chemins ? Compostelle disparaît des justifications pour plusieurs lieux dont la ville du Puy
Article de 2010, présentant un ouvrage toujours d'actualité dans ses conclusions sur les modalités de l'inscription. Complété en avril 2023 de liens vers des articles du site ayant traité de cette...
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